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La transparence : un élément indispensable pour votre galerie

18 décembre 2020

Les règles qui orchestrent le marché de l’art ont toujours attesté d’un degré d’opacité très élevé. Malgré l’élaboration progressive d’un cadre législatif plus ferme, la transparence du marché de l’art est un combat complexe, ralenti par divers facteurs. En effet, les prix, le processus d’achat ainsi que l’historique et l’authenticité d’une œuvre d’art sont, aujourd'hui encore, fortement constitutifs de la doctrine d’occultation qui domine le commerce d’œuvres d’art. Cependant, la transparence du marché de l'art et les lois qui la mettent en œuvre tendent à profiter non seulement à une nouvelle génération de collectionneurs, mais aussi aux marchands d’art.

Dans cet article, Artsper vous explique comment la politique de transparence peut aider votre galerie à dynamiser ses ventes et élargir son spectre de nouveaux acheteurs.

I. Les dessous de l’opacité du marché de l’art

Une des principales caractéristiques du marché de l’art est le silence sur les montants des œuvres vendues. Qu’ils s’agissent de maisons de ventes, de grandes foires artistiques ou encore de galeries, la plupart des acteurs de vente ont pour coutume de monnayer les œuvres qu’ils présentent, dans un mutisme des plus marqués. C’est en effet dans les coulisses que sont fixés les prix, dans la plus parfaite opacité, au détriment des acheteurs. Avant de vouloir changer ce constat, il est nécessaire de savoir ce qui se cache derrière cette stratégie de vente bien particulière pour comprendre qui en profite.

Taire les prix : une stratégie avantageuse pour les marchands d’art...

Premièrement, d’un point de vue purement concurrentiel, divulguer le montant d’une œuvre vient affaiblir l’organisme vendeur. En affichant ses prix, il n’est pas à l'abri qu’un potentiel marchand antagoniste ou un simple acheteur, choisisse de vendre ou d’acheter à un prix nettement plus avantageux, des œuvres du même artiste. Cette volonté farouche et hautement pécuniaire de dissimuler le prix des œuvres vendues sur le marché de l’art est une façon de lisser l’achat et de le rendre presque chimérique aux yeux du grand public.

De plus, ne pas révéler le prix d’une œuvre permet aux organismes de vente d’opérer une large manœuvre sur la fluctuation du prix dans le temps. L’agence de presse américaine PR Newswire met en lumière un rapport sur le Marché de l'Art mondial, présenté en 2015 par Artprice. Ce rapport illustre parfaitement l’évolution fulgurante de la côte d'artistes contemporains tels qu’Andy Warhol. En effet, l’article PR Newswire, mentionne à juste titre la prise de valeur faramineuse et presque irrationnelle de l’œuvre Dollar Sign, mise en vente pour 7,7 millions de dollars par la Maison de ventes Christie's, œuvre qui était vendue pour 160 000 de dollars en 1997, et adjugée à 150 000 de dollars en 1988.

Andy Warhol, Dollar Sign, 1981

Et qui profite aussi aux acheteurs !

Si les marchands d’art choisissent délibérément de garder secret le prix d’une œuvre, les collectionneurs, eux-aussi, y trouvent leur compte. En effet, certains préfèrent que leur image ne soit pas menacée par la somme, souvent conséquente, qu’ils ont payée pour s'offrir une œuvre. De plus, révéler le montant des œuvres qui constituent le patrimoine d’un éminent collectionneur peut présenter un risque.

En outre, l'absence de prix qui est souvent révélatrice d’un montant exubérant, est corollaire d’un certain élitisme, qui confère aux acheteurs un sentiment de distinction et d’élévation sociale. On tend souvent à stéréotyper ces collectionneurs éminemment riches, qui, loin que cela leur déplaise, se sentent alors appartenir à un groupe puissant et décisionnaire sur le marché de l’art. Dans un article Artnet, Marc Glimcher, président de la galerie Pace, explique très justement que dès les années 1960, période à laquelle l’art moderne commence à enflammer le marché de l’art, « Plus les prix étaient exclusifs ou élevés, plus les acheteurs étaient nombreux ».

Un tableau de Basquiat acheté 110,5 millions de dollars par un collectionneur japonais lors d’enchères organisées par Sotheby’s

Vers une transparence du marché de l’art ?

Si l’opacité qui régit le commerce de l’art semble plutôt conforter les grands acteurs de ce marché, il n’en demeure pas moins que cette stratégie subisse, depuis quelques années déjà, une mutation inévitable. Une réponse, semble-t-il, aux divers enjeux contemporains et nouvelles problématiques, auxquels le monde de l’art est confronté. Notamment avec l'arrivée de nouveaux collectionneurs, comme les millennials, aux pratiques commerciales et comportementales remarquablement distinctes de leurs prédécesseurs, qui alimentent d’ailleurs l’explosion du marché de la vente d’art en ligne.

Les collectionneurs millennials changent la donne

La transparence contribue à inspirer la confiance entre l’acheteur et le vendeur. Exhiber les prix dans une galerie ou lors d’une foire permet à l'acheteur de s’assurer que l’œuvre rentre bien dans son budget. Mais cela signifie aussi plus de clarté au niveau des termes et des conditions entourant le processus d'achat de l’œuvre et des services qui en découlent. La quête de transparence est quasi omniprésente chez les collectionneurs millennials. Ultra-connecté, ce nouveau segment de consommateurs est particulièrement plus enclin que les autres générations de collectionneurs d’art, à découvrir et à acheter des œuvres d'art en ligne. Ainsi, ils dénichent de nouveaux artistes et découvrent des œuvres via internet et les réseaux sociaux. S’ils n’ont pas peur de chercher des informations, ils sont aussi habitués à trouver rapidement ce dont ils ont besoin.

Novices ou passionnés d’art, ces nouveaux acheteurs s’imposent progressivement comme des acteurs majeurs d’un marché de l’art en pleine mutation. Le montant d’une œuvre, qu’il soit élevé ou raisonnable, devient pour eux, une information principale qui vient justifier son acquisition. Devoir se renseigner sur un prix ou sur des détails relatifs à une œuvre qui suscite leur intérêt peut constituer très rapidement un obstacle au processus de décision d'achat. Découragés, ils se désintéressent alors rapidement de vos œuvres pour se tourner vers des œuvres aux informations plus accessibles.

Conscients des enjeux de sécurité et de transparence mais aussi de l'oligarchie qui gouverne le marché de l’art, cette nouvelle génération réclame une transparence implacable et ce aussi bien en physique que sur internet. En effet, le rapport Hiscox sur le marché de l’art en ligne paru en 2018, note que « Bien que les collectionneurs existants soient habitués à la confidentialité et à un manque de transparence en matière de prix », cette tendance n’est pas partagée par les nouveaux collectionneurs d’art. En effet, pour 90% d’entre eux « la transparence des prix constitue un élément et un critère essentiel lors d’un achat d’art en ligne ».

La vente en ligne : un levier infaillible

L’essor d’internet et notamment de la vente d’art en ligne, vient bousculer les traditions parfois désuètes du marché de l’art. La présence de ces multiples plateformes de ventes d’art en ligne, hautement compétitives, pousse les acheteurs à s’engager dans une recherche effrénée de transparence de l’information. En effet, sur internet, les acheteurs d’art ont directement accès au prix d’une œuvre, ils peuvent donc les comparer sur différents sites de vente. Afin de pleinement inspirer la confiance des vos potentiels acheteurs il est important que les prix en ligne soient les mêmes que ceux pratiqués dans votre galerie. Mais cela ne suffit pas, les consommateurs qui décident d'acheter de l’art en ligne, via le site de votre galerie par exemple, attendent plus que des prix parfaitement affichés.

Pour anticiper les questions et les appréhensions des collectionneurs, mais surtout pour conforter leur décision d’achat, vous devez les rassurer. Votre principal objectif est qu’ils soient parfaitement au fait des moindres informations concernant l’œuvre qui leur plaît. Aussi bien des aspects purement visuels (technique utilisée, dimensions, support de l’œuvre, encadrement), que de la certification de l’œuvre en elle-même (tirage, authentification, signature de l’artiste). La livraison, la sécurité du paiement et la garantie de l’œuvre sont également des points cruciaux pour rassurer vos clients quant à leurs achats.

Il est donc nécessaire pour votre galerie, que des réponses claires soient mises à la disposition de vos clients pendant leur processus de recherche et de découverte d’une œuvre. Pour convaincre vos acheteurs en ligne, vous devez être transparent et précis en mentionnant tous les détails relatifs à l'œuvre. Détail non négligeable, vous pouvez aussi donner des informations plus personnelles sur chacun de vos artistes (rédaction de courtes biographies ou mises en avant de leurs expositions par exemple). Tous ces détails permettront aux collectionneurs de prendre une décision éclairée et de se sentir plus en confiance pour procéder à l’achat.

Takashi Murakami, Shangri-la Shangri-la Shangri-la Silkscreen, 2017, en vente sur Artsper

En conclusion ?

Le marché de l’art évolue vite, et ses acteurs aussi. En prenant conscience de l’importance de la transparence, vous cultiverez et fidéliserez de nouveaux acheteurs, qui disposent aujourd’hui d’un potentiel d’achat flexible. Pour attirer la confiance des collectionneurs, vous devez vous adapter à leurs pratiques commerciales et comportementales. Si la dissimulation des prix a été dans le passé un gage de qualité, cette pratique désuète ne correspond pas aux nouveaux codes de l’achat d’art en ligne. D’autant plus, qu’un marché de l’art plus transparent permet aux jeunes collectionneurs ou collectionneurs débutants d’accéder plus facilement à l'achat d'art. Ainsi, la transparence représente un accord gagnant-gagnant : c’est un un gage de confiance pour l’acheteur aussi bien qu’un levier pour le marchand d’art.