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5 Questions que tout galeriste devrait se poser

Analyse de l'évolution du métier de galeriste et des problématiques actuelles

29 juin 2016

"Le marché de l'art n'a jamais été aussi rapide" déclare Marc Spiegler, en novembre dernier lors de son discours acclamé au Talking Galleries Barcelona Symposium 2015. Le directeur monde de la foire Art Basel y constate les changements majeurs qui affectent la vie des galeries aujourd'hui, y compris en profondeur. En isolant 10 questions que tous les galeristes devraient se poser, Marc Spiegler affirme qu'il est primordial que la profession de galeriste évolue avec les mutations du marché et ses nouvelles problématiques. Artsper a sélectionné 5 questions que vous devez vous poser dès aujourd'hui.

1. À combien de foires devrais-je participer ?

Les foires d'art contemporain apportent une crédibilité certaine aux galeries qui y sont présentes. Pour un galeriste, choisir de candidater à une foire plutôt qu'à une autre n'est pas toujours évident.

La "fairtigue", contraction de fair (foire en anglais) et de fatigue est un phénomène consécutif de l'explosion du nombre de foires depuis une dizaine d'années. Ce néologisme définie le sentiment que provoque un trop plein de foires et d’œuvres d'art dans le cadre de ces événements essentiels au bon fonctionnement du marché. Se retrouver dans le nombre croissant de nouvelles foires et de nouvelles branches de foires déjà existantes semble de moins en moins évident et certaines galeries investissent du temps et de l'argent dans des foires inadaptées. En effet, elles ont pour la plupart l'impression qu'il est nécessaire de faire un maximum de foire pour être crédible, à la fois auprès de leurs collectionneurs mais également auprès de leurs artistes. Il s'avère pourtant plus concluant de choisir en qualité plutôt qu'en quantité et de construire sa présence sur une foire pendant 2 ou 3 années plutôt que d'abandonner une foire qui n'a pas été concluante pour votre galerie en terme de ventes.

2. La rapidité du marché provoque-t-elle une addiction fatale ?

Le marché de l'art est en perpétuel mouvement et il est parfois difficile de suivre les tendances et les actualités.

La carrières des artistes est de plus en plus express, ils commencent tôt et ont quelques années pour faire leurs preuves. Le marché évolue, proposant certaines œuvres aux enchères seulement 2 ans après leur sortie de l'atelier. L'une des conséquences de la rapidité du marché est l'effet sur le travail de jeunes artistes qui ne représentent pas un mouvement mais dont les oeuvres s'apparentent à du "merchandising". Marc Spiegler cite l'article paru en 2014 sur www.artcritical.com titré Zombies on the Wall - Des Zombies sur le Mur pour illustrer cette tendance. L'essor du marché de l'art en ligne accentue également la rapidité du marché, permettant d'acheter de l'art partout, à tout moment et en un clic. Communiquer massivement en ligne permet de démocratiser l'art contemporain et d'aiguiser le regard des collectionneurs et primo-accédants.

3. Instagram remplace-t-il les stands sur les foires, ma galerie, ou moi-même ?

Instagram est en 2016 le réseau le plus utilisé par les acteurs du marché de l'art. Une ascension fulgurante qui en inquiète certains.

Certains comptes Instagram se présentent aujourd'hui comme des galeries exclusivement en ligne. Sans avoir pignon sur rue, des amateurs d'art s'improvisent galeristes en promouvant leurs artistes en ligne. Parallèlement, certains artistes pensent de plus en plus qu'ils peuvent, grâce aux réseaux sociaux et à des expositions isolées, vendre leurs œuvres seuls. En effet, la fin des galeries a été prédit il y a déjà quelques années mais il semblerait tout de même que l'espace de galerie traditionnel confirme son importance dans le cadre de la vente d'art. Les foires quant à elles ne désemplissent pas, confirmant l'importance accordées aux mondanités du marché de l'art et au contact des collectionneurs avec les galeristes, les artistes et leurs œuvres. Instagram n'a donc pas encore prévu de vous remplacer.

4. Ai-je réellement besoin de payer un loyer pour un espace ?

Les mutations du marché de l'art conduisent les plus pessimistes à remettre en question le traditionnel White Cube et l'espace de la galerie en général.

Paradoxalement, alors que certains galeristes envisagent de poursuivre leur carrière sans louer d'espace d'exposition fixe, beaucoup de galeries ouvrent un 2nd espace dans la même ville ou à l'international. Même si certains affirment que plus personne n'entre dans les galeries, l'espace physique est toujours primordial. Les artistes ne voudront pas travailler avec des galeries qui n'ont pas d'espace. Cela dit, il est important pour une galerie de se renouveler. Changer par exemple d'espace tous les 7 ou 10 ans énergise et dynamise le travail de la galerie. L'architecture du lieu et le quartier dans lequel il a été implanté apportent à l'identité de la galerie. Un White Cube classique dans le Marais n'aura pas le même effet qu'un hôtel particulier à Montmartre.

5. Devrais-je continuer à être galeriste ?

Marc Spiegler, conclue son intervention par une question existencielle. Sa réponse en vidéo :

Marc Spiegler, 2 November 2015, Barcelone © TALKING GALLERIES

Kenza Zidi